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Ecrivaine occitane, semeuse de graines de folie. Etre écrivain, c'est combattre, c'est dire, dénoncer, tous les jours, à chaque instant, jusqu'au dernier souffle. C'est aussi écrire pour vous faire évader. Quitter les sentiers battus et partir vers d'autres horizons.

SUITE de l'affaire nationale "la petite vieille qui pelait les murs"

Si vous avez raté le début 

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La Vacquerie on ne sait plus quel jour de la semaine et d'ailleurs on s'en fout. En 2022, ça c'est sûr. 

 

Oui ? Quel exemple ? où va la France ? Dans l’après-midi de samedi, des manifestations ont eu lieu à Lodève au milieu du marché hebdomadaire. Les gendarmes se sont mobilisés pour défendre les mémés vacquéroises qu’ils connaissent bien. La colère du préfet de police de Montpellier n’a plus de borne. Evidemment, les gendarmes et leurs collègues se sont retrouvés face à face. Il y avait aussi les pompiers et le personnel hospitalier venus pour soutenir les personnes âgées du village, les maires des communes du Lodévois Larzac, les directeurs des organismes de retraites, et la population locale. Nous déplorons de nombreux blessés du côté des manifestants. Malgré l’aide des maraichers présents ce matin-là et qui ont fourni les munitions, - courges bien mûres, tomates, patates douces et autres légumineuses – cela n’a pas empêché les manifestants de prendre cher. Beaucoup se sont retrouvés en garde à vue à Montpellier, d’autres au CHU, toutes populations confondues, y compris les gendarmes. C’est l’anarchie sur le plateau du Larzac.  Le gouvernement parle d’insurrection et de désobéissance inadmissible, alors que le directeur de la PJ a été surpris quittant la Vacquerie le coffre de sa voiture plein de pots de confitures et autres denrées alimentaires. On parle même de morceaux de bois, de bidons de pétrole et de sacs de granules, le tout pour une modique somme de cent mille euros. Actuellement il est séquestré à la mairie du village transformée en QG du CDMVPVPTII ou « comité de défense des mémés vacquéroises et autres personnes victimes de persécutions et traumatismes perpétrés par des individus indéterminés ». N’oublions pas que les exactions continuent à l’encontre des vieilles personnes du village sans que la police ait un seul début de commencement de piste. A la mairie la résistance s’organise. La « vieille dame indigne » comme l’appellent les médias à la solde du pouvoir, n’ose plus sortir pour promener son chien et se plaint toujours de passage régulier à la machine à laver la nuit. En fait, tout le monde s’en fout. L’affaire a pris une dimension nationale et les jérémiades des vieilles folles font perdre leur temps aux journalistes de la télévision qui ont vraiment d’autres chats à fouetter. A tel point que les matous du village se cachent on ne sait où, créant une atmosphère de suspicion insupportable dans un contexte local déjà bien déglingué.

A demain pour d’autres informations.

 

Lundi date indéterminée

 

Après un week-end morose durant lequel les Vacquerois se sont terrés dans leur village, les affaires reprennent pour le monde médiatique. Les ragots vont bon train dans les journaux. Pour la police c’est l’occasion de montrer à la population qu’on ne plaisante pas avec la justice. A la Vacquerie, la suspicion s’est installée. Car, même si les étrangers se fichent comme d’une guigne de ce qui peut arriver aux ancêtres, il est bien ancré dans l’esprit des Vacquerois qu’une brebis galeuse est cachée dans le troupeau et prête à s’attaquer à la frange la plus fragile de la population. La question non formulée est sur toutes les lèvres : qui en veut aux petites vieilles ? Elles sont plusieurs à présent à se plaindre d’horribles douleurs et de passage à la machine à laver pendant la nuit. Ce qui demeure de plus en plus suspect aux yeux des policiers, c’est l’amitié qui unit toutes ces dames. Un gang de vieilles dames, ça s’est déjà vu. On s’interroge en haut lieu sur leurs motivations. Le ministre de la Solidarité est persuadé que tout le village est derrière un trafic douteux et certainement juteux. Le directeur de la PJ est toujours aux mains de l’association qui menace de le perdre sans eau ni chauffage, les yeux bandés et les mains attachées dans le dos, dans les dédales du cirque de Navacelles si les cent mille euros prix du butin volé par le directeur ne sont pas remboursés dans les plus brefs délais. La vie du directeur ne tient qu’à un fil. N’oublions pas que le loup rode et a été aperçu sur le plateau depuis plusieurs mois. Malgré cette menace, la banque de France refuse de payer et le gouvernement parle d’une taxe sur les voitures comme autrefois la vignette. La première ministre demande à l’Europe de mettre la main à la poche. C’est dans cette ambiance de crise nationale que les Corses réclament leur autonomie, craignant pour leurs personnes âgées éminemment respectées sur l’île de beauté.

En milieu de journée, une information met le feu aux poudres. Au fond du coffre de la voiture de l’écrivaine, la police scientifique a mis la main sur un gilet jaune tâché de sang. Malgré les protestations de la vieille dame qui prétend s’être blessée en changeant sa roue, le doute n’est plus permis pour les policiers. Il s’agit bien d’un gang proche des gilets jaunes. Seul le commandant Nabet n’adhère pas à cette hypothèse. Il est démis de ses fonctions et mis à pied pour collusion avec un groupe terroriste.

Mardi du même mois et de la même semaine.

 

La journée d’hier a été lourde de menaces sur la police nationale et le gouvernement. En Occitanie, la révolte gronde. Près de l’étang de Thau, on parle de nouvelles croisades contre les Albigeois même si Albi n’a rien à voir avec l’histoire en cours. Tout le monde se souvient de l’horrible massacre de la population de Béziers mis à sac et brûlé par les croisés en l’an 1209. L’atteinte à la personne de l’écrivaine vacquéroise qui ne l’est pas, a fait des remous dans la ville de Frontignan dont elle est native. En secret, les deux maires se sont rencontrés pour tenter de comprendre les enjeux de de cette persécution des vieilles dames. Y a-t-il un rapport avec ce qui s’est passé à Béziers en 1209 ?

La population, elle, ne compte pas se laisser faire. Les Frontignanais appellent les Vacquérois et tout le Lodévois Larzac à aller ensemble manifester devant la préfecture de police de Montpellier. Comme il fait beau et doux, beaucoup ont répondu favorablement à l’appel. Covoiturage et mise à disposition des bus font qu’une énorme foule doit se retrouver aujourd’hui. Le prix du carburant ayant dangereusement atteint la côte d’alerte, d’autres villes du littoral et de nord de L’Hérault ont entamé une marche vers Montpellier. On voit des troupeaux entiers de brebis descendre les drailles et les chemins de transhumance accompagnés de tracteurs remplis de fumiers d’ânes, vaches, brebis, chèvres et autres animaux d’élevage en plein air que les éleveurs comptent déverser devant la préfecture.

En attendant, à la Vacquerie c’est la sidération. Les habitants se posent les questions cruciales qui circulent sur toutes les lèvres ce mardi matin : sont-ils l’enjeu d’une force occulte qui s’en prend à ses pépés et mémés pour une raison qui leur échappe ? Font-ils partie d’un plan plus grand pour éradiquer les personnes âgées ? Pourquoi chez eux plutôt qu’ailleurs ?

Le commandant Nabet, exclu de l’affaire ne compte pas rester sans rien faire. Il a installé son QG de résistance chez l’écrivaine qui ne sait plus où dormir vu que son domicile est squatté par les amis policiers dissidents du commandant. Au petit matin, ils ont été réveillés par des cris dans la rue. Une autre vieille dame amie de l’écrivaine est passée à la machine à laver pendant la nuit. Quand cela va-t-il s’arrêter ? Le commandant promet qu’il va trouver le ou les coupables. En ce qui concerne les médias, plus un mot sur les déboires des personnes âgées de la Vacquerie même si de temps en temps quelques journalistes notent encore que c’est leur faute si la France va mal en ce moment. Certains soupçonnent les gilets jaunes d’être dans le coup et d’avoir créé ces évènements pour mettre la panique, alors que tout allait bien en France. C’est en ce sens que s’est orientée l’allocution du président de la République que plus personne n’écoute.

La vieille dame, quant à elle, jure qu’elle n’a rien à voir avec tout ce dont on l’accuse. Elle a seulement de grosses douleurs, des brûlures dans tout le corps et une énorme fatigue. Mais tout le monde s’en fout. Même chose chez ses amies. Mais le drame couve. A Saint Maurice de Navacelles, d’autres personne se plaignent des mêmes symptômes. Les Vacquérois soupçonnent les Navacellois de vouloir se faire remarquer. Une sorte de jalousie inter village en somme.

Cet après-midi à quinze heures, la manifestation devant la préfecture risque d’être chaude.

 

Jour indéterminé. Année 2022… Enfin, je suppose

 

Quel est ce brouillard dans ma maison ? Je ne vois même pas le bout du canapé. D’ailleurs, je ne suis pas sûre que ce soit ma maison. J’ai horriblement peur. La machine à laver a tourné toute la nuit. J’ai le corps lessivé et le cerveau brumeux. Hier soir, j’ai été invitée à une réunion dont je n’ai toujours pas compris le sujet. La machine à laver tournait à plein régime et personne ne semblait s’en apercevoir. A part ma copine, Maripasoula qui avait en plus le sèche-linge, mais elle ça ne se voyait pas.

« Hein ? Quoi ? Maripasoula c’est une ville de Guyane ? Et alors ? on s’en fout. On peut porter un nom de ville, il y en a bien qui s’appellent France ! »

Je disais donc avant d’être interrompue par je ne sais qui, que ma copine Maripasoula passe dans la machine à laver, le sèche-linge et… tenez-vous bien, le mixer à légumes. Elle ne le dit pas. Elle n’a pas envie de se retrouver en garde à vue. Donc à cette réunion, j’ai été invitée pour parler des problèmes de chauffage des résidences pour familles nombreuses. Comme si j’y connaissais quelque chose ! Et, accrochez-vous aux branches, on m’a dit que j’étais écrivaine et que c’était à moi d’écrire le compte rendu ! Un, je n’ai rien compris à cette soirée, deux je ne suis pas écrivaine. Je ne me souviens pas d’avoir écrit quoi que ce soit de ma vie, surtout pas des romans à l’eau de rose comme ceux qui sont dans mon placard avec mon nom dessus. Je les ai lus. C’est d’un nul ! Je pense que c’est un coup des médias nationaux pour me déconsidérer. J’étais une mathématicienne de renommée mondiale moi, pas un escrivillon de pacotille. Depuis le Covid vous savez, les scientifiques, les vrais, sont discrédités. Donc, je ne vois que ça. Ecrivaine, moi, ça ne va pas la tête. En plus, la tête, je la perds. Mes placards sont vides. Disparues les confitures, les bouteilles de vin, les bombonnes de pétrole et plein d’autres choses. J’ai dû les manger. Je ne m’en souviens pas. Je ne me souviens que de la machine à laver qui tourne toute la journée et le brouillard devant mes yeux. J’ai une hache fichée dans le dos qui coupe ma cage thoracique en deux. Elle non plus personne ne la voit. Pourtant, c’est visible une hache quand même ! J’ai mal et surtout j’ai peur.

 

Le même jour on ne sait pas quand.

 

Le commandant Nabet s’est déguisé en femme pour mener son enquête. Au café des femmes sa présence a fait polémique. Certaines croient que c’est une espionne Tchétchène venue pour enquêter sur l’implication de la Russie dans la crise des petites vieilles. D’autres penchent plutôt pour une espionne ukrainienne, ce qui ne changent rien au problème. Le commandant Nabet est reparti bredouille de sa tentative d’infiltration.

Pendant ce temps à Montpellier, la foule enfle d’heure en heure. Les rues sont noires de manifestants, les tramways à l’arrêt. On entend braire, bêler, meugler, des Arceaux à port Marianne.

C’est dans cette atmosphère campagnarde et bonne enfant que soudain…

 

A demain

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